1 Epok formidable x Corridor Éléphant mettent en avant le travail de la photographe Mélanie Dornier. Avec arrêt sur ses images d’une série intitulée Une dernière fois.

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Née à Besançon en 1980, elle a sillonné la planète. Puis Mélanie Dornier s’est installée en Normandie. En famille. Au vert. Au calme. Un rien planquée. Diplômée en sciences de l’éducation, elle vit de la photographie. Elle est comme ça : un peu là où on ne l’attend pas. Son premier appareil ? « Un Kodak que l’on m’a offert à l’âge de 6 ans. » Pas d’école de photo dans son cursus. Exceptée celle, improvisée, auprès de son grand-oncle, « qui avait un studio photo familial ». Toutefois, il ne lui a jamais appris à développer. Elle a tout découvert sur le tas. En solo. Et au gré de ses échappées. Angleterre, Inde, Chine… à chaque fois qu’elle pose ses bagages dans un pays, ce n’est pas pour des vacances, mais pour y vivre, s’en imprégner : six ans en Inde, puis quatre ans en Chine. L’immersion dans d’autres cultures l’inspire. « L’appareil photo me permet d’aller vers les autres et de découvrir des lieux ». L’outil se fait sésame. Avec lui, Mélanie Dornier ose pousser une porte, franchir le seuil d’une maison, amorcer une conversation.

© Mélanie Dornier

« Seule la lumière s’épuise à faire vivre les derniers essoufflements »

« Mon travail a vraiment commencé à être repéré au Salon de la photo en 2011. Ce qui m’a ouvert le monde des agences. » Expositions, presse, publications - dont une monographie éditée par Corridor Éléphant en 2018 -, Mélanie Dornier touche à tout. Ses images se remarquent. Certaines sont primées. À l’instar de son travail sur les femmes en Inde ou en prison. Un engagement qui lui fait décrocher une récompense au Feminist photo award, aux Etats-Unis en 2017. Cette même année, elle passe du Canon au Leica. Un choix. Un parti pris. « Ce changement d’appareil marque une nécessité, pour moi, de prendre du temps, désormais, pour faire une photo. » Elle a besoin de temps aussi pour découvrir son nouveau terrain de jeu : la Normandie. Elle se laisse guider par les habitants, au hasard de rencontres. C’est en suivant un Normand en terrains connus, qu’elle a ainsi découvert une multitude de sites abandonnés, désertés, silencieux, flingués par les années et les intempéries. Des lieux où « seule la lumière s’épuise à faire vivre les derniers essoufflements ». Elle s’est autorisée à entrer, à shooter, et ses images nous entraînent avec elle « dans l’intimité de gens qu’on ne connaît pas ». Mais les vestiges de certaines pièces en disent un peu, voire beaucoup sur les anciens habitants. Papiers peints usés, arrachés, matelas défraîchis, rideaux noircis, robinetterie et vitraux d’une autre époque… tout ramène à un passé que la photographe invite à recomposer.

Fauteuils défoncés, cheminées crasseuses, pièces dépourvues de portes et fenêtres

Intitulée Une dernière fois, cette série de lieux oubliés a fait l’objet d’expositions dans des collèges et lycées de Normandie. « Les jeunes s’y sont retrouvés, car ces espaces font partie de leur quotidien », explique Mélanie Dornier. C’est, en effet, entre ces fauteuils défoncés, cheminées crasseuses, pièces dépourvues de portes et fenêtres où la nature reprend ses droits, que les ados se réunissent pour boire, fumer, faire la fête… « Ce matériau leur parle », comme dit la photographe, rattrapée par sa formation initiale. Sa sensibilité pour « le social » lui donne des clés pour approcher les jeunes, les femmes, traiter du genre en Inde, travailler en milieu carcéral ou encore rencontrer des résidents en Ehpad. Face à ces populations, elle ne regarde pas sa montre. Rien ne presse. La priorité, « c’est d’établir des liens », indispensables pour l’exercice du portrait. « J’avance doucement. » Mais sûrement.

Pour en savoir plus sur Mélanie Dornier, c’est ICI.

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À propos de Corridor Éléphant :

Depuis 2012, Corridor Éléphant montre et relaie la photographie contemporaine, « celle qui témoigne de notre présent, celle qui demeure peu exposée, malgré sa qualité, mais aussi peu ou pas éditée, et ce, quelle que soit son origine dans le monde ». Montrer, éditer, publier, diffuser est le credo de la structure qui met en ligne plus de 150 expositions et publie une douzaine d’ouvrages tous les ans.  Si tous les ouvrages papiers sont en édition limitée, numérotée et signée par leurs auteurs, Corridor Éléphant propose également une soixantaine d’ebooks photos, disponibles sur plus de 500 plateformes numériques dans 51 pays.

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Autoportrait - © Mélanie Dornier