LS FONT DROUOT : 1 série / 7 épisodes

À l’occasion de la réouverture, le 1er octobre 2025, du café L’Adjugé, situé au rez-de-chaussée de l’Hôtel Drouot, 1 Epok formidable a poussé la porte de cette institution parisienne créée en 1852. Une institution qui reste la seule au monde à rassembler en un lieu unique – au 9 rue Drouot, dans le 9e – des maisons de vente d’horizons très différents, qui couvrent aussi bien l’Antiquité que le street art. De mai à juillet 2025, six personnalités et un duo, qui « font » Drouot, se sont ainsi confiés sur leur parcours, leur travail, leurs anecdotes… Le résultat : une série de sept épisodes, qui pose un ton et un regard sur « le seul magasin où il faut payer plus cher pour faire une bonne affaire ».


ÉPISODE 2

« Il se distingue par sa plaque en écaille de tortue et ivoire. » Margaux Serrano, commissaire-priseur, parle de son marteau. Une pièce unique, réalisée grâce au savoir-faire de deux artisans : l’écailliste Daniel Bernard et l’ébéniste Jacques Dubarry de Lassale. « Un cadeau de mes parents », confie celle qui collectionne désormais les modèles de cet accessoire obligatoire en salle de ventes. « L’écaille de mon marteau évoque la lenteur de la tortue, qui fait écho à l’endurance de mes études, que j’ai vécues comme un marathon », explique-t-elle. Quant à l’ivoire, « il incarne la mémoire de l’éléphant, essentielle pour ce métier et qui se cultive durant toute une carrière ».

Une dispersion se fait révélation

« Quand j’étais petite, je voulais devenir chanteuse… mais j’avais peur de me produire devant les autres. » Margaux Serrano va donc oublier les vocalises et c’est vers le droit – « qui mène à tout, dit-on… » - qu’elle s’oriente après son bac. Étudiante à l’Université Jean Moulin Lyon 3, elle s’interroge sur la spécialisation de son master 2. Le pénal ? Les assurances ? Elle hésite. Elle tâtonne… C’est lors d’un stage au sein de Jura Enchères, maison de ventes créée par les commissaires-priseurs Brigitte Fenaux et Philippe Étiévant, qu’elle a le déclic. Ou plus exactement durant la dispersion de l’atelier du peintre jurassien Guy Bardone, en juin 2016, qui avait attiré des amateurs et collectionneurs du monde entier : « J’ai su tout de suite que c’était cela que je voulais faire… » De retour sur les bancs de la fac, Margaux Serrano choisit alors un double master 2 en « droit et fiscalité du marché de l’art », qu’elle obtient respectivement à l’Université Panthéon Sorbonne Paris 1 et à l'Université Jean Moulin Lyon 3, dont elle va sortir major de promo. La suite ? Un passage à l’École du Louvre, quelques cours de théâtre, un diplôme en gemmologie, un autre de commissaire-priseur, un autre encore de commissaire de justice. Un solide bagage, qui l’incite à créer sa propre maison de ventes en 2024, avec le bijou comme spécialité. Le premier coup de marteau de Margaux Serrano à Drouot ? « C’était le 26 avril 2024, en présence de ma famille et de mes plus proches amis. »

« Beaucoup ont tenté de me décourager… »

« En 2017, lorsque je suis arrivée à Paris, je n’avais aucun contact dans le milieu des enchères à Paris. » Pas facile de se faire repérer, se poser, s’imposer. « Surtout que l’on recense encore peu de femmes commissaires-priseurs », souligne Margaux Serrano. Alors elle s’est accrochée. « Beaucoup ont tenté de me décourager, car je n’avais pas récupéré la charge d’un parent… Mais j’ai voulu voir par moi-même, apprivoiser le métier et travailler mon œil comme un musicien éduque son oreille, car l’histoire de l’art s’apprend toute la vie. » Motivée, engagée, volontaire, en 2024 elle se lance en solo, rue de Solférino. Le grand saut pour Margaux Serrano. De la peur ? Non. Juste une envie. Celle de se positionner dans un univers qui l’anime et l’attire depuis son expérience jurassienne. Le revers de la médaille ? Une implication sans limitation. Même durant ses vacances, elle poursuit ses visites de musées, de galeries… Autre de ses habitudes : « Il faut savoir s’entourer d’experts, comme le généraliste sait faire appel aux bons spécialistes. » Parole de fille et sœur de médecins.

« Lorsque je renchéris, j’ai le cœur qui palpite »

« Mon métier m’a libérée de l’esprit de possession. Chaque objet a sa vie, son histoire et les personnes qui lui sont liées… À chaque estimation, à chaque vente, l’aspect humain est important à prendre en compte. » Margaux Serrano parle d’émotion, de sensation, de sensibilité. Car une dispersion n’est jamais neutre. « Même moi, lorsque je renchéris lors d’une vente à laquelle j’assiste, j’ai le cœur qui palpite, » confie celle qui a longtemps fréquenté brocantes et antiquaires avec sa mère. Son premier achat ? « J’avais 10 ans et c’était un pommeau d’ombrelle en ivoire, avec une tête de chat sculptée. Je l’ai toujours… »