DENISE R 4"Ce n’est que de la lumière. Mais la lumière aide à vivre et à penser". C’est Anne Blanchet qui parle. Spontanément, elle s’est confiée, entre verres de rouge, de blanc, plateau estampillé Ricard, cacahuètes "bio et pas salées" à dispo sur le buffet. C’était lors du vernissage de l’expo de cette artiste suisse, dans la galerie Denise René rive gauche. On est arrivé vers la fin. Escale au Bel Ami juste avant, oblige. Le bar de cet hôtel de la rue Saint Benoit (Saint-Germain-des-Prés, ligne 4) nous sert parfois de QG pour travailler, trouver des idées, échanger des impressions, se marrer aussi. Surtout lorsqu’une nuée de nymphettes, bottées et mini-jupées, disparaissent dans un sous-sol, remontent en file indienne, traversent le bar, s’éclipsent dans une pièce annexe pour mieux réapparaître, avant de s’échapper dans la nuit. Retour dans la galerie. On a donc papoté avec Anne Blanchet. L’artiste suisse a aimé tomber sur un type appelé Comtesse -le "roi du pola" de cette Epok formid'- : "j’ai connu un monsieur Comtesse autrefois. Il m’a fait découvrir l’œuvre de Claude Roy". Rien que ça.

Des sculptures murales de plexiglas incisé

Puis, elle a évoqué ses sources d’inspiration. En vrac : la danse, la musique contemporaine, les arts plastiques, le plexiglas, les jeux entre attirance et répulsion, "ces limites qui créent ombres et lumières". Lumières qui font toute la magie de ses Light Drawings, exposés jusqu’à la mi-mars chez Denise René. Ces sculptures murales de plexiglas incisé offrent une variation infinie de tonalités, selon l’éclairage ambiant. Un conseil : ne pas repartir de l’expo sans le catalogue. Parce qu’il montre aussi les nuages blancs créés en extérieur par Anne Blanchet. Une série baptisée Light Drawings Outdoor, où l’artiste installe une brume impalpable, tantôt à Bruxelles, tantôt au château des Princes de Croÿ. Fascinant. Avant de partir, on a refait le monde avec Catherine Gallois et accepté d’être filmé, par surprise, par une invitée. Mais, une fois dehors, on a eu envie de se révolter en passant devant le Flore, dont la terrasse était bondée : aux pieds des clients, un SDF s’était couché, à même le bitume, les vêtements en lambeaux, les chaussures éventrées. Indifférents, les serveurs poursuivaient leur ballet. Quant aux clients, ils continuaient de commander, boire, manger, mâcher, déglutir, parler, rigoler. Comme si de rien n’était.