Elle vient de s’installer dans un nouvel atelier. Un grand studio perché au-dessus des locaux de Procédés Chénel, à Vanves. A l’orée des années 2010, alors qu’Isabelle Daëron venait d’enchaîner Ecole de design à Nantes, Esad à Reims et Ensci à Paris, elle travaillait en solo. Aujourd’hui, la designer bosse en équipe. Quatre personnes l’accompagnent dans ses projets, au sein du studio Idaë. Des projets variés, guidés par l’utile. Ses domaines de prédilection : « L’espace public et la scénographie. » Isabelle Daëron conçoit aussi bien un dispositif de rafraichissement dans le 20e arrondissement, pour la Ville de Paris, que des vitrines pour la maison Hermès ou la cristallerie Saint-Louis. Elle veille à ne pas s’enfermer, garder l’esprit ouvert et les idées larges. Dans son atelier, pas d’esquisses de tables ou de chaises : elle n’en fait pas. On trouve plutôt des plans de territoires à repenser, la maquette d’un bassin filtrant ou celle d’un futur lieu d’exposition. Des piles de bouquins côtoient aussi de drôles de matières premières : bobines de fils colorés, réglets, papier de verre, cartons, tuyaux, cordes, fausse fourrure… Sans oublier les feutres de couleurs. Elle les utilise volontiers dans une scéno, un décor ou une identité graphique. Avec le feutre, le trait rappelle l’enfance, les albums à colorier. Isabelle Daëron parle d’un effet « fait main et humain ».

Aller toujours plus vers l’essentiel

La période de crise sanitaire a d’abord permis à la designer de prendre du recul, pour mieux « accepter ce ralentissement ». Au premier confinement, elle a pris « le temps du dessin, de la lecture, de la réflexion ». Aujourd’hui, les projets ne manquent pas, mais ils se concrétisent avec une approche qui va toujours plus vers l’essentiel. A l’instar d’Envie Le labo, un éco-lieu solidaire et associatif, à Ménilmontant, dont le studio Idaë a conçu aménagement, signalétique et parcours pédagogique. Car, ici, on vend et on répare des appareils électroménagers, on lutte contre le gaspillage, on forme et on informe pour aider à la réinsertion. La médiation numérique est aussi à l’ordre du jour pour Isabelle Daëron et ses quatre complices. Pour le MAIF Social Club, ils sont en train d’imaginer un « fab lab » itinérant, destiné aux écoles, centres sociaux ou d’hébergement d’urgence. Dans la même veine, mais cette fois pour l’Agence nationale de la cohésion des territoires, ils planchent sur un dispositif mobile pour faciliter le déploiement de 4 000 « conseillers numériques » à travers la France.

Isabelle Daëron vue par Edouard Richard

Parcours sans faute et designer sans fard

« J’ai toujours aimé dessiner », confie Isabelle Daëron. D’où son cursus en écoles de design. La Morbihannaise tenait aussi à « être indépendante » et, donc, avoir sa propre structure. Le prix Audi talents awards, qu’elle a décroché en 2015, lui a donné un vrai coup de pouce pour développer son studio. A 38 ans, Isabelle Daëron, a déjà exposé au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris, dans le cadre de l’International Craft design exhibition à Taipei ou encore lors de la Helsinki Design Week. Parcours sans faute pour cette designer sans fard, ni posture. Une engagée qui croit au durable et à la poésie des mots oubliés. Pour un projet d’utilisation d’eau non potable dans des jardins collectifs, elle a redessiné et adapté la « chantepleure », l’ancêtre de l’arrosoir.

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