« J’ai grandi, persuadé que j’allais devenir peintre. » Mais lorsque l’artiste qui l’initie à la peinture lui offre son premier appareil photo, c’est le déclic : Vincent Perez a 11 ans et troque aussi sec les pinceaux contre des rouleaux de pellicules. Son premier shoot ? Le portrait de ce prof, dont le cadeau va pousser Perez jusqu’au Centre d’enseignement professionnel de Vevey, où il se forme à la photo. La suite, on la connaît mieux : des cours d’art dramatique à Genève, puis au Conservatoire à Paris et à l’école des Amandiers de Nanterre. Le cinéma le repère. La lumière l’attire. Perez débute sa carrière sur le grand écran en 1985 dans le film de Limosin, Gardien de la nuit. Ensuite Chéreau, Rappeneau, Wargnier, Antonioni, Lounguine… - la liste est longue - ou encore tout récemment Polanski (1) vont le faire tourner. « Le cinéma permet de voyager dans plein de mondes différents. J’aime découvrir de nouvelles contrées et de nouveaux habitants de cette planète », dit-il.

« La photo permet de garder en mémoire les rencontres »

Mais un art ne chasse pas forcément l’autre. Si Perez a quitté la peinture pour la photo, il n’a pas quitté la photo pour le cinéma. « Durant les tournages, j’avais toujours un appareil avec moi. Car la photo permet de garder en mémoire les rencontres. » Mais c’est dans les années 2000, lorsqu’il passe derrière la caméra, que Perez se remet sérieusement à shooter pour les besoins de ses propres réalisations que sont Peau d’Ange ou Si j’étais toi. Il redécouvre alors la liberté liée à la photo, « comparé au travail laborieux, en équipe et au long cours d’un film ». « La photo, c’est un projet que l’on peut assouvir plus rapidement et dans la solitude. Et comme je suis plutôt un solitaire, ça me convient. » Un solitaire qui s’expose et expose. Rien qu’en 2017, il a enchaîné l’accrochage d’une série de portraits à la Maison européenne de la photo avec celui d’une sélection d’images prises en Russie, à voir jusqu’au 28 octobre à la Galerie Folia (2). « La Russie est une destination où les autres ne vont pas. On est loin du tourisme de masse. Une fois sur place, on a encore le sentiment de découvrir des choses. Et j’ai besoin de sortir des sentiers battus. »

« J’ai pris exemple sur August Sander »

Les images rapportées de Russie ont été réalisées lors de quatre voyages qu’il a faits avec l’écrivain Olivier Rolin. Portraits, petits métiers, paysages, routes, villes, sites industriels ou scènes de fêtes, tirages couleur ou noir et blanc, le pays est raconté sans fioriture. « J’ai pris exemple sur August Sander », confie Perez, assis dans le salon de son domicile parisien, où un bouquin consacré à Richard Avedon côtoie le catalogue de l’expo Irving Penn au Grand Palais. D’ailleurs, son travail avec Rolin fait lui aussi l’objet d’un livre, intitulé Un voyage en Russie (Delpire). « J’ai des travaux en cours », reprend Perez. Il fait allusion aux photos qu’il réalise au sein de la communauté congolaise à Paris. « Je n’ai pas encore assez d’images… Mais, à terme, en faire un livre, pourquoi pas. » Il évoque également d’autres projets « plus ambitieux », pour lesquels il cherche un financement. Et puis il se dit surpris que certains lui commandent désormais des travaux photo. On le réclame, pour ses images.

(1) « D’après une histoire vraie », en salles le 1er novembre. (2) 13 rue de l’Abbaye, Paris 6e # www.galerie-folia.fr