Bienvenue sur la place du Château. Ici, en plein centre du Grand-Lucé, village de 1 900 habitants aux confins de la Sarthe et de la Touraine, chaque mercredi, c’est jour de marché. Une vingtaine de petits producteurs locaux y ont leurs habitudes. Derrière les étals et les toiles hissées pour se protéger des intempéries, les hauts murs de pierre de l’enceinte médiévale cachent un domaine d’une trentaine d’hectares. Son nom : le Château du Grand-Lucé. Érigé entre 1760 et 1764, Diderot, Voltaire, Rousseau ou encore Mozart ont séjourné dans ce « petit Versailles » sarthois, comme certains l’avaient alors surnommé. Aujourd’hui, la bâtisse de 4 000 m2, ainsi que ses jardins et bois qui s’étendent sur 34 hectares, sont classés Monuments historiques. Acquis en 2017 par le couple d’Américains Tom et Marcy Holthus, le domaine s’est transformé en hôtel… très confidentiel. Car 19 chambres seulement, un spa, un bassin de nage creusé dans une ancienne fontaine et un restaurant – « Le Lucé » - dont la salle n’accueille qu’une vingtaine de couverts. Aux beaux jours, les repas sont également servis en terrasse, ce qui permet de doubler le nombre de convives. Mais celui ou celle qui souhaite déjeuner, dîner, boire un café ou un verre de vin… dans tel salon, sur tel canapé, dans tel sous-bois ou telle autre partie du parc… en a aussi le droit.

400 variétés de fruits, légumes, plantes et fleurs

Pour pouvoir pousser l’immense porte cochère vert bouteille du château, il faut montrer patte blanche. Seul un code, envoyé au préalable par SMS, permet l’accès au domaine. Gravier, perron, puis hall d’entrée XXL dépourvu de réception. C’est un maître de maison qui accueille et guide entre enfilade de salons, boiseries, parquets d’origine, pièces de mobilier Louis XV, objets d’art chinés, soies précieuses ou autres lits à baldaquin et baignoires sur pieds dans les chambres. Tout aussi bluffant à l’extérieur, avec jardin à la française, parc boisé pourvu de sept répliques de statues du Château de Versailles, chênes tricentenaires et potager de 2 500 m2. Un terrain de jeu idéal pour le chef Maxime Thomas et son complice Philippe Briet de Rainvilliers, directeur paysagiste du Château du Grand-Lucé. « Je fais découvrir au chef certaines variétés, qu’il teste ensuite en cuisine », explique-t-il. Et le choix est large. Car le potager, divisé en huit carrés et doté d’un verger, compte quelque 400 variétés de fruits, légumes, plantes et fleurs. « Les bonnes années, souligne encore Philippe Briet de Rainvilliers, nous produisons jusqu’à 500 kilos de pommes et de poires et 150 kilos de courgettes. »

Couleurs locales

Circuit court… toujours. Au-delà de ce qui est cueilli et ramassé au sein du domaine, la proximité est de rigueur pour tout. Les volailles proviennent de la Cour d’Armoise, à Coulans-sur-Gée, dans la Sarthe. Le chef cuisinier travaille aussi la poule Le Mans, une variété de poule noire du XVIe siècle, élevée dans les herbes hautes et nourrie au sarrasin chez un éleveur sarthois. Quant au bœuf, Maxime Thomas a choisi un bœuf fermier du Maine, avec label rouge et indication géographique protégée. À cela s’ajoute le pigeon de Racan, sourcé dans le nord-ouest de l’Indre-et-Loire. Puis, côté mer, le chef sélectionne des poissons sauvages de ligne, pêchés en pratiquant l’ikejime, une méthode qui évite de faire souffrir le poisson. Proximité aussi dans le choix des vins. Les caves du Lucé comptent 150 références, dont 80 viennent du Val-de-Loire, avec des vignobles qui jalonnent la route de Nevers jusqu’à Nantes. Enfin, qu’en est-il du pain ? Les baguettes sortent du four de la boulangerie l’Épi lucéen, place de l’Église, au Grand-Lucé. Ultime touche d’une certaine idée de la simplicité et d'un art de vivre tout en subtilité.

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Château du Grand-Lucé : 7 place du Château, 72150 Le Grand-Lucé. Et aussi ICI.