Repoussons les poussettes

Elles sont partout. Dans le bus, le métro, les bistrots, les grands magasins, les salons de la porte de Versailles et même jusque dans le Jardin Majorelle, à Marrakech. Incongru ? Malvenu ? Les poussettes s’imposent. En imposent. Indisposent. La ville leur appartient. Elles en ont fait la conquête. Sacrées poussettes. Rien ne les arrête. Cet après-midi, au BHV, il y en a même une qui a écrasé la Converse de mon pied gauche : les roues ont laissé une marque incrustée sur le caoutchouc blanc de la tennis. Un genre. Pas pardon, bien sûr. Pas le temps. La poussette est pressée. Et bébé, déjà stressé ? La maman, elle, avait l’oreille collée à son smartphone : « alors je la prends en bleu ou en blanc, la chemise ? » demandait-elle à son interlocuteur. La chemise en question était hideuse. Et la mine du bébé, boudeuse. D’ailleurs il s’est subitement mis à hurler. Mais sa mère a continué : « et pour Michel, tu crois qu’une écharpe lui ferait plaisir ? Au fait, comment va ta sœur ?... » Pendant ce temps, la poussette bloquait toute une allée du BHV. Peu importe. La néo-charrette a tous les droits. Et l’enfant est roi. Un roi en pleurs, car l’heure du goûter était passée. Et la mère totalement dépassée. Même les auteurs de science-fiction les plus avant-gardistes n’ont pas osé imaginer l’ère de la poussette. Et pourtant nous sommes en plein dedans. Epoque formidable ?