IMG2985« On nous cache tout, on nous dit rien », chantait Dutronc en 1966. Un demi siècle plus tard, rien n’a changé. Toutes les infos ne sont pas bonnes à dire, à écrire. Pire : d’aucuns les manipulent, les désarticulent. Parce que les certitudes ont la vie dure. Certains débarquent sur le terrain et en savent d’emblée plus que celles et ceux qui occupent déjà la place. Résultat : la trentaine d’étudiants de la première promotion de Ferrières, école qui forme à l’hôtellerie de luxe et à la gastronomie, en région parisienne, ne se sont reconnus ni dans le reportage récemment diffusé sur M6, ni dans un article paru cet automne dans L’Obs. Dans les deux cas, ils ont eu l'impression de passer pour des gosses de riches. Des nantis. Des planqués. Or, la majorité sont des boursiers et font des extras, le soir ou le week-end, pour payer l’école et le loyer de leur studio à Bussy Saint-Georges. S’ils ont intégré Ferrières, c’est par passion et par intérêt pour un enseignement atypique. Car, ici, on casse les codes. Avec des cours sans « par coeur ».

« On s’entasse à quatre dans une Smart »

Elèves et enseignants échangent, débattent, partagent des expériences. Une dynamique qui répond aux attentes des étudiants. Des jeunes venus parfois de loin. A l’instar de Christian qui a tout quitté au Liban pour parfaire ses connaissances en hôtellerie. Quant à Jules, il est parti de l’université Concordia, à Montréal, « pour venir apprendre la cuisine ». Et c’est en skate qu’il relie chaque matin Bussy à l’ancien château du baron James de Rothschild, où l’école a élu domicile. Car, contrairement aux images diffusées sur M6, Ferrières n’est pas dotée d’une navette privée pour conduire les élèves. « Soit on prend le bus, soit on s’entasse à quatre dans une Smart », raconte Anastasia. A 27 ans, diplômée d’un double Master en Droit français et russe, elle a abandonné la direction d’un resto dans le 16ème arrondissement pour se spécialiser en sommellerie. Repartir de zéro ne lui a pas fait peur : époque formidable. Quand on voit le nombre de salariés qui flippent à l’idée de donner leur dém’, alors qu’ils sont maltraités à longueur de journée, on ne peut que saluer l’audace d’Anastasia. Pour répondre au reportage diffusé sur M6, les étudiants de Ferrières projettent de se filmer eux-mêmes pour montrer leur « vraie vie ». Sans fard. Sans fioriture. Certes, leur docu ne sera pas vu par 4 millions de téléspectateurs, mais vis-à-vis des autres écoles, des professionnels de l’hôtellerie et de la restauration, ils auront rectifié le tir. Rétabli la vérité. Leur vérité. Celle d’un lieu à part, qu’ils ont adopté après s’y être adaptés.